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Jasmin Désir, un militant de la cause du sida aux Cayes

« Je suis infecté par le VIH/SIDA et je suis homosexuel », confie sans détour Jasmin Désir. Ce militant de la cause du sida, très connu du quartier de Richelieu non loin du boulevard des Quatre chemins de la ville des cayes dans le département du Sud, est le président de l’union des personnes luttant contre la discrimination et la stigmatisation. (UPLCDS). Assis auprès de son compagnon, un jeune dans la quarantaine, il raconte ses déboires qui a débuté vers son adolescence. « Depuis l’âge de 12 ans, j’ai un petit faible pour les hommes. Je suis comme ça ; je ne peux pas faire autrement », dit-il en écartant ostensiblement ses dix doigts. « Mes parents ne pouvaient tolérés ce penchant. J’étais à leurs yeux un malade qui faisait honte à la famille. Un beau jour, ils m’ont mis à la porte. Depuis lors, j’ai connu des rapports sexuels en veux-tu en voilà. Je ne sais combien d’hommes j’ai connus. C’est de là. C’est à partir de ces imprudences que très jeune j’ai été infecté par le virus qui conduit à la maladie du sida », regrette Jasmin dont le compagnon taciturne ne lâche pas d’un regard.

Stigmatisation et acceptation de soi

Livré à lui-même comme bon nombre de jeunes cayens homosexuels rejetés par leurs parents, Jasmin devient la risée des riverains de son quartier. Il est pointé du doigt.  Partout où il passe, il est taxé de  « Ti masisi  », «  madan dyo », « pédé  » et d’autres quolibets qui lui poussent à s’auto-stigmatisé.  Dans ces moments de grande solitude, il ne sait vers où se tourner pour trouver une consolation.

A l’église, le jeune homme n’est pas le bienvenu. Depuis qu’il est enfant, il est nourri de la sainte bible qui jette des anathèmes aux personnes ayant des rapports homosexuels.

Au plus fort de sa maladie, lorsqu’il commence à rencontrer des personnes infectées, il se refait une santé morale. Il intègre une association regroupant lesbienne, gay, bisexuelle, trans et intersex(LGBTI). Il est dans son élément. S’appuyant sur ce groupe de support, il apprend qu’un séropositif peut -être surinfectée s’il ne se protège pas avec un préservatif. «  L’association m’a beaucoup aidé. Autrefois je connaissais beaucoup de déchirure. Je sais que notre préservatif s’accompagne de gel pour bien huiler l’acte sexuel » dit  Jasmin sur un ton de voix efféminée.

La vie continue pour Jasmin qui se renseigne sur la maladie. L’association dans laquelle il milite est l’Union des personnes luttant contre la discrimination et la stigmatisation, devient un moteur qui l’encourage à rencontrer des personnes ayant des rapports homo pour les porter à bien gérer leur penchant naturel.

Le Compagnon de Jasmin ne pipe mot. Il acquiesce souvent la terre pour approuver ce que raconte son partenaire.  « En association, on est très fort. On s’épaule mutuellement et on apprend mieux à vivre avec la maladie », poursuite Jasmin. Il est sous antirétroviraux et suit les conseils du personnel soignant qui le suit depuis 2010.

Dans les centres hospitaliers, la stigmatisation est toujours d’actualité. Comment Jasmin vit-il cette situation?

« On est pas stigmatisé quand on va se faire soigner dans les centres hospitaliers aux Cayes. Autrefois les membres du personnel de santé ne gardaient pas leur langue dans leur poche. Ils vous crachaient carrément ce qu’ils avaient sur le cœur », avoue Jasmin qui croit qu’un effort a été accompli pour que les gens acceptent de soigner sans discrimination toute personne séropositive peu importance leur tendance sexuelle.

Rencontré à ce sujet, le Dr Beauséjour Jude Ronald  coordonnateur des centres GHESKIO à l’hôpital immaculée conception des Cayes, a révélé  qu’il  n’existe pas de programme dédié à cette catégorie de personnes, toutefois les institutions établies dans la métropole du sud offre un encadrement à ces derniers pour appliquer la politique du ministère de la santé publique qui ne fait aucune discrimination dans le domaine sanitaire.

Selon le dernier rapport d’Enquête  Mortalité  Morbidité  et Utilisation de services (EMMUS V)  dans le département du Sud, sur 100.000 habitants 1416 ont été infectées  soit1.4%.

Le taux du VIH SIDA a chuté en Haïti  à moins de 2.2%  dans la population en général, il a fait une montée en flèche chez les homosexuels. Interrogé sur cette question. Le directeur de SEROvie , Réginald Dupont  a fait savoir que «  le VIH/ SIDA est en hausse chez les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes  aujourd’hui en Haïti.  18.1% est la séroprévalence chez cette catégorie que les travailleurs sociaux décrivent sous l’acronyme HARSAH et 8.4 % la prévalence  chez les travailleurs de sexe. »